la vérité du nihilisme

Si l'arbre a une saveur, c'est celle de ses fruits.  ²Voilà ce que pourrait être la morale d'un jardinier.  ³Ce ne serait pas forcément la morale d'un gastronome.  ⁴À quoi tend ceci ?  ⁵C'est que l'adepte du néantissime se ferme à lui-même toute issue, et c'est sa grandeur autant que sa misère.  ⁶Si toutefois le rien a une grandeur, si toutefois il a une misère.  ⁷Autre est la sagesse positive, celle qui ne se conclut pas par ces mots :

⁸« Les êtres meurent ou naissent, se séparent ou se rassemblent.  ⁹Dans la nuée de leur tourbillon, moi, point fixe, je précise les pensées qui mèneront à mon anéantissement.  ¹⁰Si ma mort vient naturellement je m'en réjouirai, mais je n'aurai sans doute pas cette chance et il me faudra la hâter.  ¹¹Pourtant, un quelque chose m'arrête et délaie indéfiniment la pression de la gachette.  ¹²Il s'agit de ce mystère qui fait la série de ma vie, conçue comme infinie sommation d'événements-unités.  ¹³Ce mystère, je dois le percer.  ¹⁴Je dois comprendre la succession des causes et des effets qui a mené à une histoire à ce point sordide, éclairer le tohu-bohu confus de cette existence unique, et, quand je l'aurai fait, unifié enfin avec le monde, je pourrai appeler de mes vœux le dernier impact. »

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