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III
ENCORE s'il existait un moyen de fixer comme au cordeau les diverses raisons qui se pressent de tout côté pour apprécier la vie à sa juste valeur, le problème de donner un sens à la vie, et aussi de ce fait un jeu de valeurs, trouverait une solution assez immédiate et du moins convaincante, ce qui nous dédouanerait de l'Effort, de la Quête. Les choses paraîtraient « ce qu'elles sont » selon la formule à nous étonnamment naïve de leur platitude la plus terne. Il ne serait nul besoin de creuser, d'aller fouiller derrière le décor de nos évolutions, en amont de la scène où nous nous démenons sans grande conviction ni réel
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réel —— Le réel, mot qui vient du latin « res », qui veut dire : « une chose ». Le mot « res » a donné en français les mots réel et réalité, car ce qui est réel, c'est ce qui correspond à une chose, et la réalité, c'est le domaine des choses (dont on peut parler). Le mot « res » a aussi donné le mot « rien » ! Le sens premier du mot « rien » était « une chose », un peu comme l'anglais anything. Ainsi, quand on demande si on a besoin de rien, ou qu'on dit que quelqu'un est rien content, ou qu'on se plaint d'un rien, cela veut dire : « une chose ». Ce sens demeure dans la façon moderne de parler, car si on dit qu'on ne veut rien, cela veut effectivement dire qu'« on ne veut une chose », autrement dit, qu'il n'est pas une seule chose qu'on veuille. Dans le Colloque des Oisives, « réel » renvoie au régime des choses qui tapissent l'existence, donc d'une certaine manière c'est bel et bien ce que tout le monde entend usuellement par « réel », mais cela va un peu plus loin, car on veut aussi désigner par là « le monde des choses spécifiquement » (ainsi, une maison ou une voiture sont plus des choses qu'un être humain ou qu'une prière, par exemple). De plus, le sens négatif de « réel » qui le relie à « rien » n'est pas non plus absent, et, si l'on sait lire avec cautèle, on pourra trouver à l'occasion une connotation qui va dans ce sens.
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moment.
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