Chant deuxième
Ô Muse à la rigueur de fer,
Précédemment je chantais la
Situation délètère
Dans laquelle Ricard S.A.
Se débattait; or, à présent
Que je poursuis cette ballade,
Que j'entonne ce second chant
À la gloire des limonades,
Je dois dire de quelle allure
Ricard [tm] finalement
Enraya sa déconfiture ,
Rétablit son fonctionnement.
Or voici que Ricard dans ses
Réflexions ne vit pas venir
Coca le grand qui fait danser
La jeunesse et la soif honnir.
Coca-Cola le pétillant
À Ricard adressa ces termes :
« Entreprise au bilan brillant,
» Anisette au goût isotherme,
» Je t'apporte la délivrance
» De tes ennuis tout actionnaires.
» Vends-moi tes parts, nulle créance,
» Et à Coca le débonnaire
» Fais don de toi, reçois salaire;
» Soumets-toi à mon joug légal,
» Reconnais-moi, je t'exonère
» Et te rachète, ô mon vassal,
» Pour peu qu'à moi tu t'agglomères.
» C'est ainsi que tourne le monde
» Affairiste et toute la sphère
» Du Capital, aussi immonde
» Et cynique paraisse-t-elle :
» Car toujours l'offre et la demande
» Font des S.A. battre les ailes,
» Et c'est le Profit qui commande. »
Ricard [tm] au goût sévère
À ces mots devient de glaçon,
Son comité se désespère,
Son cours décroît à l'unisson.
« Quoi, moi, producteur de boissons
» Appréciées dans tout le pays,
» Je vais me vendre à l'échanson
» Qui tient tous les États-Unis !
» Je suis entreprise locale
» Et me mondialiser ne veux;
» Refuser ce marché bancal
» Je l'appelle de tous mes vœux ! »
Coca-Cola laisse ces mots
Franchir l'espace de sa bouche :
« Ricard, je sais combien ces maux
» Ici profondément te touchent;
» Et je crois qu'inconsidérée
» Est pour cela ton attitude;
» Car sans rien voir d'exagéré
» Tu n'as que peu de latitude.
» Ton sort est quasiment réglé,
» Tu as des dettes, j'ai le fric,
» Il n'y a pas à balancer,
» Tu dois accepter ma logique. »
Ricard au goût d'anis pourtant
Ne veut pas ses prérogatives
Perdre dans un si court instant,
Une transaction si hâtive;
Il se démène et se débat,
Et crie à l'aide aux partenaires,
En premier à Orangina,
Sa toute première actionnaire :
« Ô camarade en joint-venture,
» Vois quel est mon état faiblard ,
» Vois quelle est cette investiture,
» Que réclame Coca sans fard !
» Viens je t'en prie à la rescousse
» De ta loyale succursale
» Que les vautours ici détroussent,
» Avec les hyènes commensales !
» Le brun Coca au goulot tors
» Veut sur ma chaîne productive
» Étendre son règne retors,
» Et aspirer ma force vive !
» Ô mon alliée, Orangina,
» Maîtresse des jeux et des ris,
» Des sons et de la Lambada,
» Secours-moi quel qu'en soit le prix ! »
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